Japanese food experience : what a hit !

Au Japon, nous avons testé beaucoup de restaurants, du simple restaurant de quartier aux brochettes prises dans des stands au coin de la rue, en passant par des restaurants étoilés. Nous avons toujours suivi notre intuition, sauf quand nous avions une ou deux adresses spécifiques en tête, et nous n'avons jamais, mais vraiment jamais, été décus. A mon sens, ce n'est pas un hasard. Non pas que notre intuition soit au dessus de la moyenne, mais simplement, parce que la qualité de l'offre, en terme de restauration, est très élevée. C'est impressionnant. Après 4 ou 5 endroits pris au dernier moment, en suivant le bout de notre nez, et être sidérés à chaque fois, ce ne peut plus être de la chance. Chez "Kobe Misono", pour notre dernier déjeuner, dans Ginza, un des quartiers où l'immobilier est le plus cher au monde, Audrey s'en est tiré pour 10,8 euros, pour 150g de viande de qualité, des légumes frits devant vous, une soupe miso, du riz, le tout dans un cadre classe avec un cuisinier devant vous (regardez les photos d'hier), et un service discret et efficace. En France, pour ce prix, sur les Champs Elysées, l'équivalent du quartier (mais où un appartement doit coûter trois ou quatre fois moins cher), elle aurait eu un steack haché chez Hippopotamus. Là aussi, impressionnant. Et nous sommes allés là que parce que nous avons vu une enseigne à l'extérieur en voyant marqué "Kobé, teppanyaki" et que nous avions envie de viande, sachant qu'autour de nous, dans toutes les rues, il y a 5 restaurants par immeuble. Dans une société hyper compétitive, les autres sont sûrement aussi agréables et surprenants. Tokyo est bien au dessus de Paris à ce niveau.

 

Nous parlions, dans un article, de l'offre de restaurants, qui nous a bluffée dès les premiers jours. Pour vous faire comprendre, un chiffre. Tenez-vous bien : il y a ici 138 000 restaurants. A Paris ? 12 500. Oups. On pourrait penser à cet instant, raisonnablement, que qualité et quantité sont deux choses différentes. C'est en partie vrai, mais ce qu'il faut retenir, croyez-moi, c'est que la qualité de ce que l'on trouve par hasard, sans faire de recherche, est bien au dessus de ce que nous connaissons là aussi à Paris. La gastronomie est ici une religion, pas comme en France, où cela est différent. Il y a une grosse attente. Rappelez-vous notre premier restaurant de sushis, celui avec les écrans pour commander. On a payé 13 euros à deux de mémoire. Vous avez vu la qualité, le choix, sans parler de la fraicheur et du goût ? On n'a là aussi jamais vu ça chez nous. Le boeuf ? Un grand pays pour ça aussi, et disponible pour un prix raisonnable. Pour avoir ce boeuf là à Paris (même si le notre est excellent, aux races variées, sain, mais il faut aussi y mettre le prix pour avoir quelque chose de qualité), il faut mettre 70 euros dans le plat (juste le plat, pas le menu), quand on arrive à trouver du boeuf de Kobe (sans parler du matsuzaka, le nec plus ultra de l'élevage wagyu). En fait, c'est assez simple. Pour un grand restaurant, le prix est souvent beaucoup plus cher au Japon (mais c'est un pays qui coûte cher aussi, quoi que vous fassiez). La plupart des trois étoiles sont à 500 euros par personne pour dîner. Par contre, pour 80% des restaurants, c'est moins cher et/ou meilleur que chez nous, et, dans 50% des cas, de loin. Rétrospectivement, je comprends maintenant qu'il y ait plus de restaurants étoilés à Tokyo qu'à Paris. Il y en effet 15 trois étoiles, 53 deux étoiles, et 175 une étoile. Tokyo est la ville où il y a le plus de trois étoiles au monde. Il y en a 5 de plus qu'à Paris, selon la selection Michelin éditée en novembre 2012. Interessant, surtout pour un français. En refléchissant, en essayant de comprendre - car cela m'interpelle - cela illustre une chose : la mutation de l'ordre gastronomique mondial. Même au delà du chiffre en lui-même, Paris n'est plus, sûrement depuis plusieurs années déjà (il suffit d'aller à Londres pour comprendre), la capitale de la gastronomie. Peut-être, en voyant les restaurants qui n'existent pas chez nous, mais aussi en repensant à ce que les Chefs disent de bien en général sur notre savoir-faire (comme ce chef indien interviewé à Delhi, mais tant d'autres), que nous sommes trop assis sur nos traditions, que le monde nous envie, et qui nous empêche du coup d'en sortir. En effet, pourquoi créer quand pots au feu, blanquettes et desserts sont épatants ? Nous avons de la technicité, mais notre manque d'audace (malheureusement dans bien des domaines) ou de créativité, au profit de la préservation de la tradition, nous freine surement, quand on voit ce qu'il y a ici, et qu'on imagine ce qu'il pourrait y avoir en France (encore une fois, hors restaurants étoilés) avec les produits que l'on a. Ironie du sort, parmi les plus grands restaurants de Tokyo, 2 ou 3 sont français (comme "Quintessence", ou Robuchon, ou encore "Beige", le restaurant d'Alain Ducasse, devant lequel nous sommes passés par hasard). Nous réalisons aussi que la France a d'incroyables atouts, et que certains individus savent les utiliser, pour le plus grand bien du pays, et sans que beaucoup s'en rendent vraiment compte sur le territoire.

 

Toujours à propos de bouffe, ce qui fut remarquable, c'est la déclinaison des produits, à l'infini, comme dans ce restaurant de crabes à Kyoto. Ici, on trouve une multitude de produits de la mer (comme le fromage ou le vin chez nous), et des dizaines de façons de les cuisiner. On utilise toutes les parties du poisson, les oeufs, le foie, les nageoires, en risotto, soupe, sashimi ou autre....Il existe 30 types de restaurants différents (teppanyaky, soba, shabu shabu, ramen, izakaya, tonkatsu, sushi, tempura, udon...). Vous choissisez un restaurant en fonction de la manière dont vous souhaitez que le produit soit cuisiné. Le respect qui leur est apporté, systématique, est remarquable. En France, on ne voit pas cela, comme ici. Le produit est toujous traité noblement, et nous ne parlons pas que des restaurants haut de gamme que nous avons faits (car dans ce cas, la France est bien sûr au même niveau), mais justement des restaurants de coins de rue ou milieu de gamme. Il faut en genéral toujours reserver, étant donné la nature hautement perissable des produits utilisés.  La culture japonaise s'exprime ici pleinement, et ce n'est pas un hasard, si un jour vous avez la chance d'aller au pays du soleil levant, si tous les commentaires ou guides parlent et décrivent une expérience culinaire qu'il ne faut pas manquer. Même le Lonely Planet classe en deuxième position la cuisine japonaise comme raison d'aller au Japon. Nous comprenons pourquoi après ces deux semaines. En outre, on trouve de tout. Comme le dit François Simon, un critique gastronomique, on ne parle pas de restaurants italiens, mais napolitains, sardes, toscans.... le message est donc clair : une cuisine est forte lorsqu'elle se nourrit de celle des autres. Paris a bien des progrès à faire. J'ai également ressenti une vraie créativité. De la recherche, de l'innovation, de la prise de risque, des associations originales, bref... de la modernité. Une culture forte n'a jamais peur de se laisser envahir et enrichir. L'aspect compétitif de l'éducation japonaise est peut-être aussi un facteur explicatif.

 

La recherche de pureté est omniprésente, et se fait jusque dans les gestes du couteau. Notion d'harmonie, d'esthétisme, de beauté qui doit s'exprimer du début de la découpe à la présentation de l'assiette, en passant par le soin et la délicatesse du service. La nourriture ici est une illustration parfaite de l'esprit japonais. Difficile à décrire, mais une vraie sensation, qui résonne avec les autres expériences, formant un tout qui se renvoie la balle successivement, dans un écho sans fin, vous donnant faim, envie de revenir, et de partir à la découverte de toutes ces enseignes situées aux étages, et de ces "joints" (petits bars blindés, casuals, d'ici ou d'ailleurs, exigüs, ou l'on mange debout, où l'on rencontre, discute et se détend) qui vous dépaysent et vous transportent dès le seuil franchi.

 

Il faudra revenir.

 

 

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